Licenciement sans cause réelle et sérieuse : fondements et contestation
La cause réelle et sérieuse est l’élément déterminant pour licencier un salarié, quel que soit le motif de licenciement retenu : personnel ou économique. Un licenciement intervenu sans cause réelle et sérieuse expose principalement l’employeur à des conséquences pécuniaires. Le salarié est en droit de contester son licenciement s’il l’estime abusif.
I - Qu’est-ce qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?
A – Définition d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Conformément à l’article L1232-1 du Code du travail : il faut une cause réelle et sérieuse pour justifier un licenciement.
Un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou abusif n’est donc basé sur aucun motif légitime justifiant une telle rupture du contrat de travail, ou sur un motif insuffisant, telle une faute légère disproportionnée à la sanction disciplinaire prise. Les motifs de licenciement retenus peuvent faire l’objet de contestation devant le Conseil de prud’hommes.
B - À qui incombe la charge de la preuve d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?
En vertu de l’article 1315 du Code civil, c’est à celui qui prétend qu’une obligation lui est dûe de la prouver. En cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, c’est au salarié qui prétend être lésé de contester le bien-fondé et à l’employeur de prouver l’existence d’une cause réelle et sérieuse.
C - En quoi est-il différent d’un licenciement nul ? Et d’un licenciement irrégulier ?
1 - Quelle différence avec un licenciement nul ?
Le licenciement nul repose sur un motif prohibé par la loi (articles L1132-1 à article L1132-4 Code de travail) intervenu en violation d’une liberté fondamentale (licenciement discriminatoire…). Il est aussi sans cause réelle et sérieuse.
2 - Quelle différence avec un licenciement irrégulier ?
Le licenciement irrégulier, c’est lorsque la procédure de licenciement n’a pas été suivie correctement. Ce type de licenciement n’est pas de nature à empêcher la rupture du contrat s’il repose sur une cause réelle et sérieuse.
II - Quels sont les motifs justifiant un licenciement pour cause réelle et sérieuse ?
A - Ceux pour un motif personnel
1 - Disciplinaire
Les faits fautifs commis par l’employé dont la faute peut être simple, grave ou lourde :
- Vol ;
- Insubordination ;
- Violences au travail ;
- Menacer de mort son employeur…
2 - Non disciplinaire
Le salarié n’a pas commis de faute, mais ne peut accomplir ses missions confiées au travail en raison :
- De son inaptitude professionnelle ;
- D’une incapacité de travail ;
- Insuffisance de résultat à condition que la raison invoquée tire sa source dans son inaptitude professionnelle ou incapacité de travail.
B - Ceux pour un motif économique
Cette raison de licenciement pour cause réelle et sérieuse n’est pas inhérente en la personne du salarié, mais extérieur. Cela peut être dû selon le Code du travail (articles L1233-2 à 7) à :
- Des difficultés économiques auxquelles l’entreprise fait face ;
- L’arrêt de son activité ;
- Les mutations d’ordre technologiques ;
- La réorganisation de l’entreprise pour la sauvegarde de sa compétitivité sur le marché.
III - Comment contester un licenciement pour cause réelle et sérieuse ?
A - La demande de précisions des motifs du licenciement
Suivant la lettre de licenciement reçue en recommandé avec accusé de réception ou en main propre contre décharge, le salarié peut contester son licenciement. Sous 15 jours à réception de cette lettre, il est en droit de demander des précisions quant à la raison du licenciement à son employeur.
B - Sous quel délai est-il contestable ?
La rupture du contrat de travail peut faire l’objet de contestation dans un délai d’un an sous peine de prescription de l’action à compter de la notification de cette rupture (confère l’article L1471-1 C. du travail).
C - La saisine du Conseil de prud’hommes
Le salarié peut engager une procédure auprès du CPH pour licenciement abusif. Après l’échec de la tentative de conciliation devant le bureau de conciliation (BCO), les Juges devront se prononcer postérieurement sur le litige lors d’une audience dédiée à cette affaire.
IV - Quelles sont les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?
A - La réintégration dans l’entreprise
Le Juge peut prononcer la réintégration du salarié dans l’entreprise en vertu de l’article L1235-3 du Code du travail, sous accord des parties en cas de licenciement abusif. Le salarié bénéficie de tous les avantages acquis avant le licenciement.
S’il est réintégré à la suite d’un licenciement nul, il a droit à ses salaires non versés durant la rupture de son contrat (Cass. Soc. 25 janv. 2006, n°0347517).
B - Quelles indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ?
Le salarié licencié abusivement peut bénéficier s’il refuse la réintégration dans l’entreprise de :
- Une indemnité en cas de licenciement abusif avéré, dont le montant est fondé sur l’ancienneté du salarié, le salaire habituel par mois de salaire brut, et fonction du barème Macron prévu à l’article L1235-3 du Code du travail, qui vise à réparer le préjudice subit par le collaborateur licencié abusivement ;
- Une indemnité de licenciement pouvant être légale ou conventionnelle ;
- L’indemnité compensatrice de congés payés dont le montant est équivalent au salaire brut que le collaborateur aurait touché s’il avait travaillé durant ses congés ;
- L’indemnité compensatrice de préavis ;
- La compensation financière en cas de clause de non-concurrence.
C - Le remboursement des allocations chômage versées par Pôle emploi
Suivant les articles L1235-1 à L1235-6 du Code du travail, le salarié non protégé ayant fait l’objet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse n’a pas à rembourser les sommes versées au titre de l’allocation chômage d’aide au retour à l’emploi (ou ARE) qu’il a perçu durant toute la durée d’inactivité.
C’est différent s’agissant d’un salarié protégé, mais ce, sous conditions (Cass.soc, 19.11.14, n°13-23643). En raison du principe de non-cumul, il ne peut à la fois bénéficier des allocations chômage et de l’indemnisation perçue à ce titre (entre le licenciement et sa réintégration), si ce dernier est réintégré dans l’entreprise.
D’un autre côté, l’employeur peut être tenu au remboursement s’il se retrouve dans la situation suivante : entreprise de plus de 11 salariés, avec un employé dont l’ancienneté est supérieure à deux ans.
V - 3 exemples de licenciement abusif
Exemple 1 - Un employé refuse de conduire un engin non sécurisé
Dans une espèce en date du 16 février 2022, la juridiction suprême de l’ordre judiciaire a donné raison à un salarié licencié pour faute grave en ce qu’elle a considéré son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et pour cause, ce dernier avait refusé de conduire un engin, à savoir un tracteur agricole et forestier ne respectant pas les règles de sécurité, et avait été licencié en ce sens. Le motif invoqué par la société qui l’employait n’était pas valable compte tenu de la législation et des intérêts en présence (C.Cass.civ., Chambre sociale, 16 février 2022, 20-15.435, Inédit).
Exemple 2 - Quand l’employeur congédie un collaborateur sur la base d’enregistrements vidéos non justifiés par la nature de sa mission
Dans cette espèce, un salarié avait fait l’objet de plusieurs rappels à l’ordre verbaux quant à son comportement en cuisine, étant cuisinier, à savoir les règles d’hygiène, ses absences injustifiées et les horaires de travail. Par la suite, l’employeur a décidé de mettre en place un système de vidéosurveillance à destination de ce seul employé pour constater tous ses manquements à ses obligations contractuelles. Puis le licencia pour faute grave, car son comportement n’avait pas changé, preuve à l’appui. La Cour d’appel, puis la Cour de cassation ont prononcé un licenciement sans cause réelle et sérieuse, car quand bien même, il aurait des preuves, la vidéosurveillance violait l’article L1121-1 du C. du travail, à savoir que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la tâche à réaliser ni proportionnées au but visé. De ce fait, ces enregistrements ne lui étaient pas opposables. En l’absence de preuve, les allégations de l’employeur n’étaient pas fondées, son licenciement non plus. (C.Cass.civ.soc. 23 juin 2021, Pourvoi n° 19-13.856, Publié au bulletin).
Exemple 3 - Une collaboratrice licenciée sans indemnité de préavis
Dans une autre espèce, la haute juridiction a fait droit à la demande d’une salariée licenciée sans cause réelle et sérieuse concernant le paiement d’indemnité compensatrice de préavis à raison de son renvoi de la société. Dans un premier temps, la Cour d’appel avait rejeté sa demande, car cette dernière se prévalait d’un statut de cadre qui lui avait pourtant été refusé. La Cour de cassation n’est pas allée dans ce sens, puisque pour elle, en dépit du statut de cadre, le licenciement sans cause réelle et sérieuse était de nature à rendre légitime la demande d’indemnité de préavis de la salariée. (C.Cass.civ.soc. 4 septembre 2019, 18-14.836, Inédit).
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