La requalification d'un CDD en CDI
Le contrat à durée indéterminée (CDI) est la forme normale et générale du contrat de travail. Toute relation de travail est normalement à durée indéterminée (L1221-2 du Code du travail). Le contrat à durée déterminée (CDD) n’est pas interdit, mais il reste exceptionnel et encadré. Le contrat de travail à durée déterminée ne peut intervenir que dans les cas énumérés aux articles L1242-2 et L1242-3 du Code du travail (emploi saisonnier, travail temporaire, accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, remplacement d’une personne temporairement, réinsertion…).
Qu’est-ce que la requalification d’un CDD en CDI ?
Les articles L1242-1 et suivants du Code du travail interdisent le recours au CDD pour un emploi permanent dans l’entreprise et encadrent strictement ces contrats. Lorsque le CDD ne respecte pas les conditions posées par la loi (tâche précise et temporaire, cas définis par le Code du travail…), alors le salarié peut demander la requalification de son contrat en CDI. Si la requalification est prononcée par le Conseil de Prud’hommes, on considère que le salarié a été embauché en CDI et non en CDD, ce qui lui permet de bénéficier d’un certains nombre de droits supplémentaires.
Dans quels cas une requalification d’un CDD en CDI peut-elle être faite ?
La requalification intervient généralement quand le salarié termine son CDD sans avoir de proposition de CDI et qu’il apparaît que son CDD n’était pas régulier. La requalification peut aussi apparaître en cas de rupture du CDD ou pendant le déroulement du CDD. Un CDD est irrégulier si :
-
il concerne un emploi normal et permanent, et non pas une tâche précise et temporaire (article L1242-1 du Code du travail) ;
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il n’entre pas dans un des cas prévus par les articles L1242-2 et L1242-3 du Code du travail ;
-
le CDD vise à remplacer une personne suspendue à la suite d’un conflit collectif de travail ou concerne des travaux particulièrement dangereux (article L1242-6 du Code du travail) ;
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il ne prévoit pas de terme ou de durée minimale dans les cas où le CDD vise à remplacer temporairement une personne (article L1242-7 du Code du travail) ;
-
la durée totale du CDD dépasse les durées légales prévues à l’article L1242-8-1 du Code du travail ;
-
il n’est pas établi par écrit, ne contient pas la justification du recours à une durée déterminée ou les éléments requis à l’article L1242-12 du Code du travail (nom, prénom, durées, convention collective applicable, rémunération, etc…) ;
-
la relation contractuelle se poursuit après la date de fin prévue dans le CDD (article L1243-11 du Code du travail) ;
-
les conditions de renouvellement ne sont pas respectées ou le CDD a été renouvelé plus de deux fois (article L1243-13-1 du Code du travail) ;
-
le délai de carence (délai devant séparer deux contrats), s’il est applicable, n’est pas respecté (article L1244-3-1 et L1245-1 du Code du travail).
Attention : Il faut noter que depuis les ordonnances de septembre 2017 modifiant le Code du travail, le fait pour l’employeur de ne pas transmettre le contrat de travail dans les deux jours comme l’exige la loi (article L1242-13 du Code du travail), ne justifie plus la requalification du CDD en CDI.
Quels sont les effets de la requalification ?
Lorsqu’un CDD est requalifié en CDI, la requalification a un effet rétroactif et immédiat. En effet, on considère que le CDD n’a jamais existé et que le salarié a bénéficié d’un CDI dès sa date d’embauche (Cass. soc., 3 mai 2016, P. n°15-12.256). Cela a des conséquences sur l’ancienneté et permet au salarié de bénéficier de différentes indemnités.
Les indemnités en cas de requalification d’un CDD en CDI
Indemnité de requalification
Lorsque le Conseil de Prud’hommes décide de la requalification d’un CDD en CDI, l’employeur est automatiquement condamné au paiement d’une indemnité de requalification. Cette indemnité est supérieure ou égale à un mois de salaire (article L1245-2 du Code du travail). Le mois de salaire correspond au dernier salaire perçu pendant le CDD ou à la moyenne des salaires perçus mensuellement dans le cadre du CDD, avant la demande de requalification.
Attention : cette indemnité est seulement perçue dans les cas où le CDD était irrégulier. Si un CDD régulier a été transformé en CDI car les relations de travail ont continué après la fin du terme, alors il y aura une requalification automatique (article L1243-11 du Code du travail) mais pas d’indemnités (Cass. soc., 27 sept. 2007, P. no 06-41.086).
Prime de précarité
Au terme du CDD, si l’employeur ne propose pas de CDI au salarié, ce dernier a le droit à une indemnité de fin de contrat, visant à compenser la précarité de sa situation (L1243-8 du Code du travail). Dans le cas d’une requalification du CDD en CDI, cette indemnité ne doit pas être rendue (Cass. soc., 30 mars 2005, P. no 03-42.667). En effet, la Cour de Cassation considère que la situation du salarié reste précaire car il demande souvent la requalification suite à la fin ou à la rupture de son CDD.
Réintégration dans l’entreprise ou indemnités en cas de licenciement
Grâce au caractère rétroactif de la requalification du CDD en CDI, le salarié va bénéficier des règles applicables en matière de licenciement. Par conséquent, le Conseil de Prud’hommes devra apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement (Cass. soc., 23 avr. 1985, P. no 83-40.175).
Si les conseillers prud’homaux considèrent que la rupture des relations de travail n’est pas justifiée, alors le salarié pourra être réintégré s’il le souhaite et si cela est possible. Si le salarié ne demande pas sa réintégration, ce dernier pourra obtenir une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour rupture abusive.
Comment procéder ?
L’article L1245-2 du Code du travail prévoit que la requalification doit être demandée par le salarié. Pour cela, le salarié doit saisir le Conseil de Prud’hommes. C’est le bureau de jugement qui s’occupe de statuer sur la demande de requalification d’un ou plusieurs CDD en CDI. La demande est examinée dans un délai d’un mois.
La requalification peut également être demandée par une organisation syndicale représentative dans l’entreprise (article L1247-1 du Code du travail). Toutefois, le salarié a le droit de s’opposer à l’action de l’organisation syndicale dans un délai de quinze jours.
S’agissant du délai pour agir, plusieurs situations doivent être distinguées depuis l’entrée en vigueur de la réforme du droit du travail :
-
si le licenciement ou la fin du CDD ont été notifiés avant le 24 septembre 2017, le salarié dispose de 24 mois.
-
si le licenciement ou la fin du CDD ont été notifiés après le 24 septembre, le salarié dispose de 12 mois.
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